Bangladesh: au moins six morts dans l'incendie d'un camp de Rohingyas, plus de 50.000 déplacés

Au moins six Rohingyas sont morts dans un incendie qui s'est déclaré dans un immense camp de réfugiés dans le sud-est du Bangladesh, forçant au moins 50.000 personnes à fuir, selon des responsables et des travailleurs humanitaires.

"Près de 10.000 abris ont été incendiés", a déclaré à l'AFP Mohsin Chowdhury, secrétaire à la gestion des catastrophes et des secours, venu sur place depuis la capitale Dacca.

"Nous avons réuni un comité de sept membres pour enquêter sur l'incendie" qui s'est déclaré lundi, a-t-il ajouté, "au moins six personnes ont péri".

Les pompiers ont fini par maîtriser le sinistre vers minuit.

Il s'agit du troisième l'incendie à se déclarer les camps rohingyas en quatre jours, a déclaré à l'AFP un responsable des pompiers, Sikder, soulignant que l'origine du sinistre demeurait inconnue pour l'heure.

Vendredi déjà, deux incendies avaient détruit des dizaines d'abris rohingyas, selon les autorités.

Près d’un million de membres de la minorité musulmane de Birmanie vivent dans des conditions précaires dans les camps du district de Cox’s Bazar, après avoir fui la répression militaire dans leur pays en 2017.

Les autorités ont indiqué que l’incendie avait démarré dans l’un des 34 camps, couvrant plus de 3.000 hectares, avant de se propager à trois autres camps forçant les réfugiés à fuir, emportant avec eux ce qu'ils pouvaient sauver.

Selon l'organisation Refugees International, au moins 50.000 personnes ont fui, l'incendie ayant réduit en cendres des milliers de baraques de fortune faites de bâches et de bambou.

 

- "Enfants courant en pleurs" -

Gazi Salahuddin, un inspecteur de police, estime aussi qu'"environ 50.000 personnes" avaient fui pour se réfugier auprès "de leurs proches dans d'autres camps". Selon lui, l'incendie a pris de l'ampleur avec l'explosion de réchauds à gaz dont se servent les réfugiés pour cuisiner.

D'épaisses colonnes de fumée s'échappaient des abris en feu où des centaines de pompiers et de travailleurs humanitaires luttaient contre les flammes et aidaient à l'évacuation les réfugiés. Le feu a fait rage pendant plus de 10 heures a raconté à l'AFP Mohammad Yasin, un Rohingya.

"C'est le plus grand incendie depuis l'afflux de Rohingyas en août 2017", a dit à l'AFP le commissaire adjoint aux réfugiés, Shamsud Douza, précisant que des vivres avaient été fournies aux personnes déplacées et que les travailleurs humanitaires essayaient de leur apporter tout le soutien humanitaire nécessaire.

"Les gens se sauvaient en courant car le feu se propageait rapidement. Beaucoup ont été blessés et j'ai vu au moins quatre corps", témoigne Aminul Haq, un autre réfugié.

"Les enfants couraient, en pleurs", se souvient une travailleuse humanitaire de l'ONG Save the Children, Tayeba Begum.

 

-"Trop grande coïncidence" -

Le représentant des Rohingyas Sayed Ullah demande "une enquête immédiate", affirmant que la nature des incendies suscitait de profondes inquiétudes.

"On ne sait pas pourquoi ces incendies se répètent dans les camps. Il faut une enquête appropriée et complète", a-t-il déclaré à l'AFP.

"De nombreux enfants sont portés disparus, et certains n'ont pas pu fuir à cause des fils barbelés installés dans les camps", a-t-il également déploré dans un communiqué.

"Nous n'avons pas pu fuir à cause de la clôture, ma plus jeune fille a été gravement blessée", a témoigné Myo Min Khan, un Rohingya, sur Facebook, immédiatement après l'incendie.

La police a toutefois rejeté cette accusation, affirmant que seule une toute petite partie du camp était clôturée.

L'ONG Refugees International s'inquiète que l'incendie ranime des souvenirs traumatisants de persécutions subies par les Rohingyas en Birmanie en 2017.

"Cette tragédie est un terrible rappel de la position vulnérable des réfugiés rohingyas pris entre des conditions de plus en plus précaires au Bangladesh et la réalité d'une patrie désormais dirigée par les militaires responsables du génocide qui les a forcés à fuir", ajoute l'organisation.

Deux grands incendies se sont déjà déclaré dans ces camps en janvier, laissant des milliers de Rohingyas sans abri et quatre écoles érigées par l'Unicef détruites.

Pour Saad Hammadi, responsable de la région Asie du Sud pour Amnesty International, "la fréquence des incendies dans les camps est une trop grande coïncidence, d'autant que les résultats des enquêtes précédentes sur ces incidents ne sont pas connus et qu'ils se répètent".